Opération de sécurisation foncière dans le Sud-Est : Les laissés-pour-compte du Pamofor (2ème partie)
« Une affaire interne »
Par anticipation www.l’etau.net avait pris langue avec un responsable de l’Afor, mieux imprégné de la question. Dans un entretien téléphonique, le 09 avril 2024, M. Anoh a fait un certain nombre de précisions :
Le programme n’est pas payant pour les bénéficiaires. D’accord. Il est entièrement gratuit. On ne demande même pas un (01) franc à qui que ce soit. Il existe cependant le comité villageois de gestion foncière qui nous accompagne. Il a été institué pour accompagner les techniciens. Notamment pour effectuer les levées topographiques sur le terrain. Et, cela ne peut pas se faire sans la présence de sachants locaux. A ce qu’il parait, c’est au niveau de ces comités qui accompagnent les équipes que de l’argent est décaissé pour leur journée. Selon les explications que j’ai reçues, c’est soit pour la restauration ou le transport sur le lieu de travail. En ce qui concerne l’Agence foncière rurale, nous sommes très ferme sur ce point. Le programme est gratuit !
Les planteurs et les propriétaires de terrains estiment que c’est tout à fait normal de débourser quelque chose. Cependant, ils jugent excessif le montant de 20 000 FCFA. Surtout que leur avis n’a pas été requis à ce sujet.
Chaque fois que j’ai l’occasion de m’entretenir avec les populations, je leur pose une question : avant l’avènement de l’Afor, combien les géomètres facturaient-ils le cadastre des parcelles de ceux qui le désiraient ? Pas moins de 700 000 F CFA, me répond-t-on. Je poursuis pour leur faire comprendre qu’il s’agit de leur organisation interne. Si elles ont des soucis pour la prise en charge des personnes qu’elles ont elles-mêmes désignées comme témoins pour accompagner les équipes techniques que dire ?
De grâce, il ne faudrait pas y associer l’Afor. Une structure de l’Etat qui a confié l’aspect pratique du programme à un consortium de géomètres agréés sur la base d’un contrat avec des charges bien définies. Lesdites charges ne prennent pas en compte la restauration des membres des comités.
Décision unilatérale
A Ayénouan, Toumanguié, Adaou où www.letau.net s’est rendu à plusieurs reprises pour comprendre le fin mot de l’histoire, il apparait qu’après le passage du dégé de l’Afor, les douze (12) chefs des villages de la sous-préfecture d’Adaou décident que point n’est besoin de longues palabres pour déterminer le montant de la contribution. A la corbeille donc les recommandations de Bamba Cheick Daniel ! Pour le plus grand bonheur de leurs sujets, chacun fixe le montant de la contribution. Donnant libre cours à des débordements, par endroits, les enchères grimpent jusqu’ à 100 000 F CFA.
Face à la vague d’indignation que suscite cette décision, Mme le sous-préfet aux oreilles de qui parviennent des murmures monte au créneau pour signifier que ; « on ne peut venir aider quelqu’un et lui imposer une contribution hors de portée ».
Déterminés à se passer de l’avis des populations, les chefs de village se réunissent une nouvelle fois à hui-clos. Ils revoient à la baisse leur prétention. Ce sera 20 000 F CFA, point barre ! Leur décision est entérinée par Mme le sous-préfet. La représentante du président de la République préconise pour les détenteurs de plus d’une parcelle, le paiement d’un forfait de 5 000 F CFA en sus, par parcelle.
Certainement moins soucieux que d’autres du pouvoir d’achat de leurs populations, certains chefs de village diminue le montant fixé. Pour leurs homologues, l’affaire est entendue. C’est notamment le cas du comité villageois de gestion foncière rurale d’Ayénouan.
Justification
Avec l’adjoint du chef de ce village au sein du CVGFR, qui avait à ses côtés son secrétaire foncier, www.letau.net a évoqué certains aspects de la question, le 11 avril.
Arouna Diarra a fourni des explications sur les raisons pour lesquelles cette contribution qu’il qualifie « d’aide au comité » a été instaurée. « Je me suis rendu compte qu’il y avait des dépenses à effectuer. L’Afor a promis au comité un appui d’un montant de 200 000 F CFA qui ne nous est pas encore parvenu. J’ai engagé les premières dépenses de ma poche. Imaginez que je ne l’ai pas fait », questionne-t-il.
Clé de répartition
Poursuivant, il a détaillé la clé de répartition de cette contribution qui fâche. « J’ai 16 agents. Ils se déplacent à moto. Il leur faut du carburant, du matériel de travail (ndlr : bottes, machettes, etc.), leur restauration doit être prise en compte. Leur journée débute tôt et s’achève tard le soir. Certains assurent la permanence de 07h à 15h. C’est vrai que c’est du bénévolat mais, ce n’est pas gratuit », explique-t-il. Quoi que…
Aveu
S’il reconnait que la fixation de « l’aide au comité » n’a pas obéi au consensus préconisé, il s’empresse d’indiquer avoir fait partie de ceux qui ont jugé élevés les premiers chiffres avancés. Il insiste, en outre, sur le fait que l’information a été passée à tout le monde par l’intermédiaire d’un griot. « Personne ne peut prétendre le contraire », déclare-t-il.
En ce qui concerne la gestion des fonds, il indique que les sommes recueillies transitent par le secrétaire foncier avant de parvenir à la trésorière. « Même le président du comité ne voit rien. Dès le début, j’ai informé Mme le sous-préfet. C’est tout ! Elle ne m’a rien demandé », fait-il savoir.
Pas obligatoire (?)
M.Arouna Diarra révèle que lui-même a payé sa contribution à Diatokro (sous-préfecture d’Aboisso) et Toumanguié où se situent ses plantations.
« A Ayénouan, personne ne peut dire qu’on lui a exigé de payer sa contribution avant d’engager les travaux de délimitation de sa plantation », insiste-t-il pour clore l’entretien.
Une déclaration réfutée par des détenteurs de droits coutumiers qui se sont vus refuser la mise à disposition du plan cadastre pour défaut de paiement.
Consulter la 1ère partie de l’enquête : https://letau.net/enquete-details-article/operation-de-securisation-fonciere-dans-le-sud-est-les-laisses-pour-compte-du-pamofor-1ere-partie.

