Azaguié-Aoua :   Purge des droits coutumiers non effective, mais titres fonciers réels et bien ficelés  (1ère partie)

L’incroyable prouesse de la société Arma S.A

Le litige foncier qui oppose les ayants-droits de feu Kpata Yaochi Claude, notamment sa fille Mme Detchio Anne Marie Yaochi à la société Arma S.A à Azaguié-Aoua, village de la commune du même nom, situé à environ 22 km d’Abidjan, aurait aussi bien pu avoir pour cadre les villages de Bingerville, Adzopé, Anyama, Yamoussoukro, Toumodi ou Danané. Il s’inscrit dans une trame familière en Côte d’Ivoire, où les terres fertiles produisent, sous l’effet d’une visibilité accrue conférée par les médias sociaux, des conflits en abondance. Une parcelle agricole d’une superficie de 42 hectares… mise en valeur à l’époque coloniale est aujourd’hui au cœur d’une bataille dans laquelle s’entremêlent coutume, cadastre, légalité apparente, purge non effective des droits coutumiers et soupçons de trafic d’influence.

Le voyageur qui arrive pour la première fois, à Azaguié, commune du sud du pays, situé à environ une vingtaine de km au nord d’Abidjan, dans la région de l’Agnéby-Tiassa, district des Lagunes est immédiatement saisi par les vastes étendues de forêt inexploitées.

Site stratégique

Cité verte et paisible, sa proximité avec l’axe Abidjan-Agboville en fait un site stratégique, convoité par les investisseurs pour les projets immobiliers, agricoles et institutionnels. Hélas, ce dynamisme qui devrait constituer sa force s’est mué en talon d’Achille. Il s’accompagne de tensions. Les litiges fonciers y sont récurrents, selon un agent municipal avec lequel Letau.net a échangé, le 07 mars 2025. « Une même parcelle peut être revendiquée par trois acquéreurs à la fois ».

« Je veux mon terrain »

C’est dans ce contexte que dans une capsule vidéo, d’une minute, publiée sur la page Facebook de Letau.net, le 05 mars 2025, apparaît dame Detcho Anne Marie Yaochi. Elle revendique, documents à l’appui, la propriété d’un terrain de 42 ha 62 ares 88 centiares, transmis par son défunt père.

Consulter le lien :

 « Je veux mon terrain », répète-t-elle inlassablement, visiblement en colère.

Sommation d’arrêt de travaux

La plaignante affirme avoir découvert fin février des engins, trois bulldozers en pleine opération de décapage sur sa parcelle. Ni elle, ni les membres de sa famille n’en ont été informés.

En vue de la préservation de ses droits, elle a fait servir par l’intermédiaire de l’étude de Me Soumahoro Dro Sylvain, Commissaire de justice, une sommation d’arrêter les travaux à l’entreprise BBT Pascal Sarl, prestataire en charge des opérations de terrassement sur la parcelle litigieuse, au maire, Alain Ekissi, le lundi 03 mars 2025.

Dans la foulée, un exploit de remise d’une sommation d’arrêt des travaux a été déposé à M. Bonga Missia Marcel, chef du village d’Azaguié-Aoua et au service Domaine de la sous-préfecture d’Azaguié.

Le maire se signale

L’ayant-droit confie avoir été convoquée par le maire d’Azaguié, suite à la délivrance de ces actes. « Une première fois, le 10 février 2025, Il a envoyé un agent municipal à mon domicile pour m’inviter à me rendre à ses bureaux. Une deuxième fois, le 12 février, 5 agents de la police municipale sont venus. Deux d’entre eux sont restés dehors. Je n’ai pas déféré à ses appels. Par ‘intermédiaire de ma sœur ainée, il m’a fait une offre de 150 millions de FCFA puis de 300 millions de FCFA. Je n’y ai pas donné suite, non plus.”

“ Va voir le maire”

Dans un appel téléphonique reçu par Detchio Anne Marie Yao, que le site d’investigation a pu écouter, sans pouvoir en déterminer la date, une dame qui se présente sous le nom de Mme Bah, explique être apporteur d’affaire dans la vente de la parcelle querellée. Elle encourage la plaignante à se rapprocher du maire d’Azaguié…Dans quel but ?

Façon cavalière

Des sources proches de la chefferie confirment qu’il y a belle et bien eu une offre. Elles avancent la somme de 60 millions de FCFA pour la chefferie émanant du premier magistrat de la commune. Elles dénoncent la façon cavalière dont le maire conduit la démarche. Au mépris des procédures en vigueur. « Si tant est qu’il s’agit d’un projet d’intérêt général, pourquoi ne se rapproche-t-il pas de la chefferie pour la purge des droits coutumiers ? », s’exaspèrent-elles.

Actes de propriété

En soutien de ses revendications, Detchio Anne-Marie présente une attestation coutumière en date du 19 mai 2022, co-signée par le chef de village et le président du Comité villageois de gestion du foncier rural. Ce document atteste que : « M.Kpata Yaochi Claude (…) est détenteur d’une parcelle rurale de de 42 ha 62a, 88ca, sise à Azaguié-Aoua, sous-préfecture d’Azaguié, Commune d’Azaguié (…) Cette parcelle ne fait l’objet d’aucune contestation des membres de la famille ni de litige des voisins limitrophes. ».

Letau.net a également pu consulter un jugement d’hérédité rendu public, le 12 août 2024 qui identifie les héritiers légitimes et reconnait leur possession paisible du terrain litigieux.  Ce jugement « constate que feu Yaochi Claude Kpata n’a fait ni donation entre vifs ni laissé de testament, en conséquence la succession est de nature ab intestat .”

Le 26 septembre 2024, un certificat de non appel vient confirmer ledit jugement d’hérédité…

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