Société

Fêtes de fin d’année serrées

On transforme la galère en ambiance.

À l’approche de la fin d’année, l’effervescence des festivités fait face aux défis imposés par la situation économique. Dans les foyers comme sur les étals des marchés d’Abidjan, chacun s’efforce de trouver un équilibre entre désirs, impératifs et stratégies pour maintenir la magie de Noël malgré la hause des prix. Avec une combinaison de précautions, de débrouillardise et d’optimisme. cette Enquête au cœur des préparatifs des festivités de la Nativité et de la Saint Sylvestre. Là où chaque sou est précieux, mais également où l’esprit des fêtes persiste avec détermination.

 Entre espoirs et défis, les préparatifs des fêtes de fin d’année restent marquées par la résilience et l’ingéniosité. Dès l’aube dans les rues animées d’Abidjan, une ambiance unique s’installe. Les vendeuses s’activent autour de leurs plateaux, exhalant des parfums alléchants de galettes encore fumantes. Les rires des enfants, jouant au milieu des flaques, se mêlent au tumulte des adultes affairés à mille tâches quotidiennes. Pourtant, derrière cette vitalité se cachent des réalités bien plus complexes.

Stratégie de survie

Pour beaucoup, cette période festive de 2025 n’échappe pas aux contraintes économiques. À Abobo Avocatier, Agnès K.,  mère de quatre enfants, déchiffre pensivement une liste de courses. « Chaque demande compte : vêtements, nouvelles chaussures, repas spécial… même les biscuits », confie-t-elle en rangeant son tablier. Elle ajuste son budget quotidiennement, scrutant le moindre changement de prix. Cette prudence devient une stratégie de survie.

Gestion et renoncement

Entre gestion et renoncements, à Yopougon Sicogi, Angèle M., couturière, revoit ses traditions familiales. Dans son atelier étroit de couture, les machines bourdonnent sans répit. Dehors, les klaxons et les appels des vendeurs ambulants rythment la matinée.

Habituée à confectionner plusieurs tenues pour ses enfants à chaque fête, elle a dû se résigner cette année à en faire une seule : « On veut faire plaisir, mais il faut garder en tête les dépenses de janvier », ibdique-t-elle en continuant son travail. Un sentiment partagé par ses collègues, qui jonglent entre responsabilités et aspirations festives.

Solutions ingénieuses

Face à l’incertitude économique, des solutions ingénieuses émergent. À Koumassi Remblais, Aïssata D., vendeuse de pain, anticipe en achetant peu à peu des produits non périssables pour les festivités : « Un kilo d’huile ici, un sac de riz là-bas… ça aide à ne pas tout ressentir d’un coup », explique-t-elle. La planification mensuelle se révèle un véritable bouclier contre la flambée incessante des prix.

À Angré, quartier plus aisé, cette prudence reste également évidente. Clarisse Z., employée dans une microfinance, anticipe Noël avec simplicité : « un repas modeste mais soigné pour privilégier l’ambiance ». Pendant ce temps, Zeinab T., étudiante, se rapproche de ses proches pour cotiser ensemble et alléger les charges : « Chacun peut contribuer selon ses moyens ; rien ne surpasse le partage familial, loin des excès et comparaisons », dit-elle avec sérénité.

 Abondance et mélancolie

Sur les marchés d’Abidjan comme le Forum d’Adjamé ou Cocovico, la réalité économique tempère l’effervescence habituelle de décembre. Les étals débordent de produits colorés : tomates écarlates, guirlandes scintillantes et jouets enfantins. Mais les acheteurs hésitent. Dame Péguy S., vétérane des jouets depuis dix ans à Adjamé, constate un effritement des ventes : « Les parents choisissent entre nourrir leur famille ou offrir un petit plaisir », constate-t-elle avec une certaine amertume.

À Yopougon Maroc, Alain E., partage ce constat : « Les enfants regardent sans insister… et les parents promettent toujours de revenir, mais on sait qu’ils ne le feront pas », dit-il.

Même les décorations longtemps prisées peinent à séduire cette année. Ibrahim, vendeur au marché Cocovico, en plaisante malgré lui : « Les guirlandes bon marché trouvent preneurs, mais celles qui brillent comme à Dubaï ? Personne ne les regarde sérieusement », lance-t-il dans un éclat de rire forcé.

Volaille et vêtement à prix d’or

Au cœur des préparatifs culinaires, la volaille incontournable devient un luxe pour certains ménages. Les vendeurs observent une tension palpable : négociations prolongées et quantités réduites traduisent les défis posés par un pouvoir d’achat sous pression.  Les cris perçants des animaux, les plumes virevoltantes et l’odeur chaude du poulailler forment une scène emblématique des festivités de fin d’année.  Bamba El- Abdoulaye, vendeur depuis cinq ans, au marché de Cocovico (Cocody Angré), partage quelques observations : « Le prix des poulets traditionnels varie désormais entre 2 000 et 3 000 francs. Quant aux pondeuses, elles atteignent 5 000 francs. Cela freine beaucoup de gens ».  Non loin, un homme observe une pondeuse, hésite un instant, puis la repose avant de se tourner vers sa femme avec un sourire amusé : « Chérie, et si on se contentait uniquement des ailes, ça irait ? »  Le vendeur éclate de rire : « Juste les ailes ? Ça là, c’est encore 2025 qui vous complique la vie hein ! »    

Tout à changé *

Dans les commerces, les clients viennent, regardent, comparent… et souvent repartent sans acheter.  Dans une petite boutique de vêtements au sein du marché Cocovico, parée de guirlandes lumineuses clignotantes, Vanessa Niamkey. repositionne une robe pailletée qui semble avoir attendu trop longtemps sur son cintre.  « Depuis cette année, tout a changé. Avant, les clientes arrivaient, achetaient vite. Les robes à 7 000 partaient sans problème. Aujourd’hui, même pour celles à 5 000 FCFA, trouver preneur est compliqué ».

Un groupe de jeunes femmes entre dans la boutique, plaisante en parcourant les rayons, immortalise quelques souvenirs en prenant des selfies… et quitte les lieux sans rien acheter. Vanessa N., toujours bienveillante, esquisse un sourire : « Au moins, elles ont embelli la boutique avec leurs photos ! »

Humour….

Avec des jouets ayant des prix faramineux, un poulet devenu presque un produit de luxe et des décorations hors de prix, certains parents se résignent avec une remarque teintée d’ironie : « Si seulement les enfants se contentaient d’une guirlande et d’une bougie, on serait riches ! ». C’est peut-être là que réside la véritable magie des fêtes en Côte d’Ivoire. Malgré la cherté de la vie, les sourires persistent, les solutions alternatives se trouvent, l’entraide prime… et surtout, l’humour reste intact. Tant que la famille peut se réunit autour d’un bon éclat de rire, l’augmentation des prix peut attendre le lendemain.

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